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La lecture de Nico : coups de cœur (et de griffes) livresques
29 décembre 2017

La Zizanie (René Goscinny, Albert Uderzo, 1970)

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     Ah, La Zizanie ! Un de mes Astérix préférés. Il faut dire que j’ai un petit faible pour les épisodes « gaulois », ceux qui ne reposent pas sur la visite d’un pays étranger, car il y a davantage de mérite à tenir tout un album avec le village pour seul horizon. La grande trouvaille de cet opus est évidemment Tullius Détritus, sans conteste l’un des personnages les plus marquants de toute la série. Du Goscinny pur jus. Autant dire du génie ! La page 8 est à ce titre un modèle du genre. On y voit cet expert ès calomnies faire son apparition au milieu des conseillers de César. Le bonhomme n’a pas besoin de prononcer le moindre mot pour semer la discorde autour de lui, et une seule bulle lui suffit pour faire sortir César lui-même de ses gonds. Il faut voir son sourire de satisfaction devant la réaction outrée de ce vieux Jules ! La scène suivante, avec les pirates, vaut également son pesant de sesterces : au moment de passer à l’abordage, ces derniers réalisent que les Romains ne leur accordent pas la moindre attention, tout occupés qu’ils sont à régler leurs comptes. Il faut dire que sur le bateau en question se trouve un certain Détritus, qui va trouver le moyen de se débarrasser des pirates en trois phrases montre en main… Arrivé en Gaule, cet adepte de la guerre psychologique sous toutes ses formes (subtiles comme bien plus basiques !) fait vite des dégâts au sein du village, dont l’unité s’effrite au gré des ragots, rumeurs et malentendus de toutes sortes, savamment orchestrés par ses soins. L’atmosphère chaotique qui en résulte est particulièrement bien rendue, trouvant son paroxysme durant le fort angoissant banquet de milieu d’album, où Assurancetourix, unique rescapé apparent de la zizanie, se sent bien seul, croyant même à « la fin du village » ! Mais ce climat délétère n’a heureusement qu’un temps, la ruse de Détritus finissant par se heurter à celle d’Astérix… J’ai adoré cet épisode. Pour toutes les raisons que je viens de donner, mais aussi pour les détails qui y pullulent, comme, entre autres :

  • la relation entre Cétautomatix et Agecanonix, souvent tout en taquineries, mais aussi parfois plus grave, comme lors de leur échange dans la forêt ;
  • la place, plus importante que d’habitude, accordée aux femmes (au rôle d’ailleurs pas beaucoup plus reluisant que celui des hommes !) ;
  • la bêtise des Romains, qui ont bien du mal à comprendre les subtilités du plan de Détritus ;
  • le vase-cadeau qui, je ne saurais dire pourquoi, m’a toujours fasciné ;
  • les (amorces de) discours d’Abraracourcix ;
  • la bataille finale, représentée sur une page entière et agrémentée de savoureux commentaires ;
  • et toujours cet art de la réplique percutante qui constitue l’une des grandes forces de Goscinny (je ne donne pas d’exemple pour laisser au lecteur le plaisir de la (re)découverte).

    Quant à Uderzo, même si l’on a vu encore bien meilleur dans d’autres épisodes, il propose un dessin très convaincant. Détritus est graphiquement parfait, et on trouve quelques belles réussites, comme la trogne du mal nommé Savancosinus, la gestuelle éloquente d’Obélix lors de son éphémère dispute/réconciliation avec Astérix, ou encore, en première page, ce sénateur romain qui parle d’ « un petit village, là-haut, en Gaule », montrant du doigt la case du dessus, représentant le village de nos héros. Sans parler bien sûr de la fameuse trouvaille des bulles vertes ! Bref, un excellent opus, quasiment du même niveau que le magnifique Domaine des dieux. On lui reprochera seulement un léger essoufflement dans le dernier tiers, où Détritus se montre malheureusement un peu moins actif. Une grande réussite dans l’ensemble, néanmoins, qui se conclut par une double pensée emplie de tendre sagesse. La première est signée Panoramix : « Ils sont braillards, tête en l’air, farfelus, mais il faut bien les aimer… Ils sont humains ! » Et Obélix de conclure à sa manière : « Ils sont fous ces humains ! ». Comme pour confirmer que cet épisode plus universel que les autres, loin de se limiter à une peuplade, traite de l’humanité dans son ensemble, de ses travers en particulier.

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Commentaires
La lecture de Nico : coups de cœur (et de griffes) livresques
  • Bonjour, ce blog littéraire traite de mes lectures préférées mais aussi des romans que j'ai moins appréciés. Pour l'anecdote, il s'agit de la version modernisée de mon ancien blog (http://leblogdenico.space-blogs.com). Bonne lecture à vous !
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